vendredi 27 décembre 2013

Abidjan du dehors et du dedans

En écrivant l'article sur les cinémas, j'observais qu'à l'époque où je vivais à Abidjan, et même dans les deux dernières années où j'étais pourtant plus âgé, j'étais incapable de situer la plupart des lieux ou des quartiers d'Abidjan. Dans cet article, j'évoquais le cinéma Le Club et je disais que je me laissais emmener sans savoir dans quel secteur d'Abidjan on m'emmenait ni par où nous passions.

C'est un fait que, si l'on m'avait présenté un plan d'Abidjan ou même seulement un plan du Plateau, j'aurais été incapable de désigner la moindre rue ni le moindre quartier. Je n'avais, je pense, même pas idée de la forme générale du Plateau, de sa situation par rapport aux lagunes etc...D'ailleurs, je ne sais pas ce qu'on m'apprenait en géographie mais je ne connaissais rien à la Côte d'Ivoire et encore moins à la France, à la surprise de mon instituteur de CM1 quand j'arrivai à Arcachon.

En réalité, je ne connaissais les lieux de mon enfance que de l'intérieur, sur le terrain et dans mon cœur. Ils existaient indépendamment les uns des autres, sans aucun lien spatial entre eux.  C'est tout juste si je connaissais le nom de deux ou trois rues. Bref, hormis sur un ou deux itinéraires pédestres reconnus parce que récurrents, je crois qu'il eût été impossible de me lâcher seul dans Abidjan sans que je me perde.

Depuis, j'ai acquis de ma ville une connaissance "extérieure", géographique, globale, de plus haut, une photographie aérienne. Je n'ai jamais connu aussi bien Abidjan que depuis quelque temps, depuis que je rédige ce blog et que je suis amené à m'intéresser à la topographie de ma ville natale, avec ses quartiers, ses noms de rues, ses métamorphoses, ses bâtiments anciens ou nouveaux, etc.... Je peux même dire, sans me vanter, que je suis désormais capable, en regardant une photo de ma ville, de repérer où et vers quelle date elle a été prise.

En revanche, la connaissance "intérieure", de près, au microscope, sur le terrain, la connaissance affective et intime, elle, s'est effacée. Par là, je veux évoquer ma difficulté ou mon incapacité à me visualiser dans telle ou telle rue d'Abidjan, à voir ce qui m'entoure, à entendre les bruits de la ville et à sentir ses odeurs. Il reste, au pire, un "concept", au mieux, une impression très vague, un charme évanescent, un parfum de souvenir, un je-ne-sais-quoi ou un presque-rien à saisir au vol avant qu'il ne s'évanouisse comme la fumée résiduelle du rêve.

De mon point de vue, j'ai perdu au change.







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